Après la chute du Vietnam Sud en 1975 le survol du Vietnam fût interdit aux avions commerciaux, or la majorité des vols entre l’Europe et Hongkong, la Corée, Taiwan et le Japon passaient par Bangkok et survolaient ensuite Paksé au Laos, Danang au Vietnam puis les Iles Paracels et contournaient Hainan. Cette route est connu sous le nom de « Ambre One corridor ».
Le fait de devoir contourner le Vietnam au sud de la pointe de Camau allongeait le temps de vol de plus d’une heure ce qui coutait une fortune aux compagnies. IATA et les compagnies intéressées entrèrent en contact avec les autorités vietnamiennes et lorsque termes d’un accord furent en vue il fût décidé de tenir une conférence à Vientiane au Laos en Février 1978. La participation incluait Hammarskjöld pour IATA, moi-même pour la SITA, ainsi que les représentants de l’Aviation Civile de Thaïlande, de Hongkong du Laos et du Vietnam, et les militaires vietnamiens. Selon la coutume en EXO lorsqu’une réunion officielle est ouverte c’est que les parties sont déjà pratiquement d’accord, seul demeurait à faire un sérieux marchandage sur le coût du survol. Les compagnies étaient prêtes à faire un certain effort pour économiser une heure de vol sur ce segment mais il fallait éviter de faire un exemple pour le reste du monde.
Je ne connais rien de plus désolant que la vue d’une ville venant d’être « libérée » par des armées communistes. Toute considération politique mise à part, la raison en est simple. Après une catastrophe naturelle tel que tremblement de terre ou inondation les rescapés s’agitent, recherchent d’autres rescapés, de la nourriture, des secours arrivent, le monde bouge et la vie renait. Après une « libération » les gens locaux restent dans l’attente, aucune raison de s’agiter puisque l’on ne sait que faire si ce n’est d’attendre des ordres. Quoi de plus triste que des rues vides, des maisons sans vie, des vitrines rendues opaque avec du carton ou du contre plaqué pour ne pas tenter un pillage éventuel, des stations d’essence entourées de barbelés chacune gardée par une sentinelle, des voitures abandonnées sans utilisation faute de carburant, pas de commerce la monnaie n’ayant que peu de valeur marchande en raison de l’obligation d’avoir un bon d’achat pour la plupart des denrées. L’armée reste immobile car ce n’est pas sa vocation de gérer des populations civiles. Il faut attendre les ordres d’une plus haute organisation. J’ai été témoins plusieurs fois de tels événements et je ne connais pas de spectacle urbain plus attristant surtout qu’il ne s’agit pas de quelques jours mais de plusieurs années avant que la ville ne présente à nouveau un aspect plus ou moins proche de la normal.
Vientiane était encore dans un environnement semi léthargique au moment de la conférence. Celle-ci se déroulait bien et le soir venu nous étions invités à diner. Fort heureusement par choix ou par nécessité il ne s’agissait pas d’un banquet officiel. Une petite auberge, anciennement tenue par un Corse, avait été ouverte. Chacun se sentait à l’aise et la sympathique ambiance du lieu contrastait avec celle triste et morne qui régnait à l’extérieur. Le délégué britannique savourait son assiette de foie gras devant un portrait de Napoléon Bonaparte, celui de la Thaïlande discutait mi-Thaï, mi-Lao, avec un officiel Laotien, les représentants vietnamiens semblait heureux de profiter de ce break dans leur régime culinaire, il est vrai que la cuisine Tonkinoise de l’époque n’était pas à son plus haut niveau.
Un officier nord-vietnamien vint me trouver, me montra une liste de matériel et me dit : « C’est ce que nous avons à Tan Son Nhat (SGN AP), cela convient-il pour le projet. » Il s’agissait en majorité du matériel fourni par les américains à l’Aviation Civile du Sud-Vietnam après le départ de l’administration française. Je répondis que c’était parfait et qu’en fait les gens de Saigon connaissait très bien cet équipement. Il hésita un peu et me répondit : « oui, je sais, mais à vous je fais confiance ».
La conférence reprit le lendemain et se termina par un accord. Si mes souvenirs sont exactes le montant du survol fût fixé à 2.000 US$ par appareil.
Le soir même Hammarskjöld et moi-même quittions Vientiane pour Bangkok dans le jet privé fourni par le Président de Philippines Airlines et nous étions accommodés pour la nuit dans la Guest-house de la KLM.
Le lendemain dans la matinée je trouvais un message de Léger, le représentant d’Air France au Laos. C’était un copain des années ‘60s, basé à Vientiane en attendant la permission des autorités vietnamiennes de prendre son poste à Hanoi. Léger me disait : « Je sais que tu es bien parvenu à Bangkok mais tu as tout de même de la chance : hier soir vous avez décollé sur le taxi-way alors que déjà la piste n’est pas bien longue, heureusement qu’il n’y avait pas d’obstacle en bout ! ».

About Bernard Leroy
Following the death of my parents I found myself at the end of WW2 at the age of 14 working as a ploughman behind two horses. Four years later I joined the French Air Forces for five years. In 1953 I joined the French Civil Aviation Administration and was in charge of the engineering maintenance of the Saigon Regional Control Centre, a very busy centre as the war was going on. Three years later the service was transferred to the Vietnamese Administration. At that time the SITA Management had in mind to operate, in Iran and in the newly independent countries of Indochina, the air/ground and ground to ground telecommunications on behalf of the local administration, in the same way as Aerosiam was doing in Thailand. For that reason I was seconded to Air France and sub-seconded to SITA in order to provide the technical support to the local SITA Representative based at Saigon. These projects did not materialise for the simple reason that the countries concerned, at least in Indochina, were expecting to obtain equipment free from US Aid, Colombo Plan and other sources instead of having a third party operating on their behalf. Some years later I ended as SITA Representative for Thailand, Laos and Cambodia and soon after took control of some centres in the Pacific while opening Sri Lanka and Burma. During these years in Bangkok I got experience dealing with local PTTs which were quite tough in those days, and competing with Aerosiam I understood airlines business and what these airlines were expecting from us. I was then appointed DR and in 1970 transferred to Hong Kong. Not long after this move I resigned from the French Civil Aviation and became a SITA staff. While based at Hong Kong and later Singapore, aiming at providing all the needs of airlines operating in the area, mostly the rapidly growing local airlines, I prepared projects, negotiated with local administrations and implemented SITA services in more than 30 Asia and Pacific countries.